dimanche 25 avril 2010

CONFÉRENCE MONDIALE DES PEUPLES SUR LE CHANGEMENT CLIMATIQUE ET LES DROITS DE LA TERRE MÈRE


Durant 3 jours (du 20 au 22 avril) j’ai pu participer tout comme 35'000 autres personnes de 142 pays à la conférence mondiale des peuples sur le changement climatique et droits de la Terre Mère comme je vous l’avais annoncé dans mon article antérieur. Ce fût donc une immense foule représentant la diversité des peuples du monde entier et l’ampleur du problème du changement climatique qui se réunit à Tiquipaya, un village à 30 km de Cochabamba au pied de la montagne Tunari qui s’avéra à la fin plutôt petit vu la multitude des participant(e)s et délégations officielles (47). Vous pouvez donc vous imaginer les larges queues lors de l’accréditation le premier jour ! Heureusement que j’avais pris la précaution de m’accréditer le dimanche d’avant comme une bonne suisse organisée et prévoyante J

Mis à part certains problèmes de logistiques plutôt inévitables vu le nombre de personnes, je dirais que l’évènement fût plutôt bien organisé avec beaucoup de conférences liées à la thématique comme les Causes structurales du Changement Climatique, la Dette Climatique, le Tribunal International de la Justice Climatique, les Droits de la Terre Mère, avec des invité(e)s de renommée internationale comme Naomi Klein (Canada), François Houtard (Belgique), Miguel d’Escoto (Nicaragua), Leonardo Boff (Brésil), Alberto Acosta (Ecuateur), tout comme la présence de personnalités intellectuelles et politiques boliviennes comme Alvaro Garcia Linera, David Choquehuanca, Xavier Albo et bien sûr le président Evo Morales. J’aimerais partager avec vous ces quelques réflexions suivantes issues des conférences qui me paraissent intéressantes:

-La cause principale du changement climatique est le capitalisme et son système et mode de production effréné basé sur l’accumulation de biens matériels et de l’exploitation des ressources naturelles.

-Nous sommes en plein dans une crise climatique et l’unique issue est celle d’en finir avec le système capitaliste car il en va de notre vie et de celui de la terre mère. Selon les mots d’Evo, soit le capitalisme meurt, soit la mère terre.

-La science ne va pas nous aider à trouver une issue à la crise climatique car ce sont d’autres connaissances qui sont nécessaires en partant de la diversité culturelle des peuples indigènes et de leurs modes d’existence. Nous devons dé-construire les connaissances occidentales et entrer dans un dialogue des savoirs. Il nous faut trouver des alternatives civilisatrices.

-La mère terre est un super organisme vivant, un système vivant et elle est un sujet de droits et de dignité. C’est une nouvelle réflexion au niveau juridique. Il nous faut repenser les fondements philosophiques lors de l’élaboration des futures lois et déclarations.

-Maintenant commence le temps de la biocivilisation. Les siècles passés on été centrés sur l’être humain, les droits de l’Homme. Le 21ème siècle est celui de la nature, de la terre mère. Les Nations Unies doivent se convertir à une entité plus grande qui inclut les Droits de la Terre Mère.Le Conseil des Droits de l’Homme devrait devenir celui des Droits de la Terre Mère et des Droits de l’Homme (Miguel d’Escoto).

-Le paiement de la dette climatique par les pays du nord industrialisés est essentiel car c’est une question de justice. Ce sont eux qui sont la cause principale des changements climatiques dont nous sommes affectés au sud.

-La solution ne vient pas du Nord mais de nous autres du Sud qui devons générer une grande alliance entre peuples du sud et du nord et aller en force au prochain sommet mondial de Cancun (Mexique). Il nous faudra utiliser le chantage ou le boycott afin de faire entendre nos résolutions.

Mis à part ces conférences il y avait une grande quantité d’évènements autogérés par diverses organisations boliviennes et internationales. L’autre espace de participation plus direct et concret a été celui des 17 tables de travail plus une, la 18, la non-oficielle, qui s’est dédiée à générer un débat critique sur les politiques environnementales contradictoires du gouvernement actuel. Les conclusions des 17 tables de travail, « qui viennent d’en bas et demandent à être entendues en haut » sont, entre autres : la nécessité de la création des droits de la Terre Mère; la création d’un tribunal international de justice climatique, qui possède le pouvoir de punir les individus, les entreprises et les Etats qui détruisent la nature; une réduction drastique des émissions de gaz à effet de serre, principalement de la part des pays industrialisés, qui doivent « décoloniser et rendre l’atmosphère à l’ensemble des êtres humains »; la limitation à un maximum de 1 degré le réchauffement climatique, et non pas à deux degrés comme le propose “l’accord antidémocratique et insuffisant de Copenhague”; le paiement de la dette climatique par les pays industrialisés aux pays appauvris, sans conditions, et à hauteur de 6% de leur PNB; la tenue d’un référendum mondial sur le climat à réaliser dans tous les pays du monde dans une année, le 22 avril, jour de la planète Terre, qui demanderait entre autres à tous les citoyens du monde s’ils sont d’accord de changer le système capitaliste, de transférer les dépenses militaires en dépenses pour la défense de la planète et de créer un tribunal climatique.

Le président Morales s’est engagé à apporter en personne ces conclusions au Secrétaire des Nations Unies, afin qu’elles soient prises en compte lors de la prochaine conférence des Nations Unies sur le changement climatique, qui se réalisera au moins de décembre à Cancun, au Mexique.

Le Kawsay présent à la CMPCC

Nous avons décidé comme Centre de Cultures Originaires Kawsay de monter un stand afin de rendre plus visible notre travail effectué dans les communautés indigènes de sensibilisation et promotion de la production écologique communautaire comme une stratégie possible de prévention du changement climatique et de lutte pour la souveraineté alimentaire des peuples. Le succès de notre stand fût dû surtout à l’exposition d’une trentaine de variétés de pommes de terre natives de la communauté de Moyapampa de la nation indigène Kallawaya (département de La Paz) d’où proviennent mes collègues Eulogia et José. Il faut aussi souligner que nous venions d’avoir faire la cueillette de ces pommes de terre, alors c’était d’autant plus gratifiant de voir l’intérêt suscité.

En guise de conclusion, je dirais que cette conférence a été un espace important d’échanges et de prises de position entre les peuples du monde entier, du nord comme du sud, tous préoccupés par l’état de santé de notre planète, de la terre mère. La tâche la plus importante actuellement est celle de diffuser l’accord issu de cette conférence mondiale sur le changement climatique et d' en faire un suivi au sein de nos organisations et gouvernements afin qu’il soit pris en compte lors des discussions du prochain sommet à Cancun. Le réseau tissé entre les peuples lors de cette conférence devra faire preuve de beaucoup de détermination et force afin de se faire entendre par les représentants des grands pays industrialisés du système capitaliste!

Autres liens :

Si vous voulez lire tout le texte de l’accord des peuples qui est le résultat de la conférence, visitez le site officiel: http://cmpcc.org/

Le blog de Mathieu Glayre, volontaire E-changer et journaliste radio qui m’a inspiré et dont j’ai tiré certaines parties de mon texte: http://blog.e-changer.ch/creciendo/ .Ses articles sont aussi parus dans le journal Le Courrier.



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